Regard sur le cataclysme, le travail de volontaire et la reconstruction du pays

autour du musée d’Ishinomaki – 14 avril 2011

Durant cette semaine, nous avons également découvert Shiogama. Le centre commerçant de la ville a été fortement touché. Peu de magasins ont repris une activité et des agents font toujours la circulation faute de signalisation en état.

Le bain public (sentou) dans lequel nous sommes allé était vétuste, disponible uniquement quelques heures par semaine. Le bâtiment était penché, mais la détermination de son propriétaire a permis sa réouverture pour les habitants du quartier.

espoirs et détermination

Afin de sortir un peu de la vie communautaire, nous avons pris quelques diners en ville. L’un d’eux nous a conduits dans un excellent restaurant de sushis. Installés au comptoir, nous patientons en regardant les cuisiniers travailler. Il y a affluence en ce samedi soir et le sushiman en face de nous entame la conversation.

Âgé d’au moins 70 ans, il s’avère être le propriétaire du lieu. Ses gestes sont précis, le sourire est là ; il est fier de son établissement. Il l’est d’autant plus qu’il a rouvert peu de temps avant. Exactement 50 jours après le passage de la vague il avait tout rééquipé, tout nettoyé, tout réinstallé et accueilli ses premiers clients.
A deux mètres cinquante du sol, une petite marque sur le mur rappel le niveau d’eau atteint. La mer est à plus de 500 mètres et pourtant il ne restait pas grand-chose du restaurant. Pour ses employés, pour la ville, pour redonner de la vie et du courage aux habitants, il a tenu à rouvrir son commerce.

Shiogama, les activités maritimes reprennent – 19 juin 2011

La pêche et le tourisme sont les principaux attraits de la région. Aujourd’hui les touristes se font rares et les volontaires comme nous ne sont pas vraiment des consommateurs, souvent pris en charge par les organisations. Il en va de même pour les militaires qui ne sortent pas de leurs camps et les agents publics envoyés sur place.
Pourtant les habitants attendent également un soutien qui redynamisera l’économie de leur région dévastée. Ils remercient tous ceux qui leur viennent en aide, mais la consommation locale doit également reprendre pour que toute la région soit de nouveau tournée vers l’avenir. C’est dans ce sens que les principales communes touchées maintiennent leurs festivals estivaux.

Notre rapide séjour nous a conduits dans une région dévastée à la rencontre de ses habitants.

Les outils industriels sont détruits, les terres sont inutilisables pour les cultures, environ 20.000 morts sont recensés et aujourd’hui encore plus de 90.000 personnes habitent des logements précaires.
A cela, s’ajoute le drame de la centrale nucléaire, les populations déplacées, des eaux polluées, une zone interdite pour de nombreuses années.

Les étrangers installés au Japon ont fuit le pays en mars. Ils reviennent maintenant, mais beaucoup d’entre eux font leurs valises définitivement. Certains couples franco-japonais des zones touchées décident de s’installer en France, d’autres repartent, comme celui qui rouvrait sa boutique de pâtisseries et de macarons à Shiogama le lendemain de notre séjour.
Rares sont toutefois les japonais qui quittent leur pays. Au contraire, ils se sentent intimement solidaires. Tous étaient au bureau le lundi 14 mars pour contribuer à la relance économique nécessaire, alors que les expatriés fuyaient déjà.

Le Japon était encore en 2010 la deuxième puissance économique de la planète. Le pays a connu un essor phénoménal après la seconde guerre mondiale qui avait durement détruit le pays, les crises immobilières et financières l’ont affaibli et maintenant tout le pays est confronté à une nouvelle épreuve.

quel monde reconstruire ?

Notre semaine de travail a été faite presque trois mois après la catastrophe. Que de choses restaient et restent encore à faire. Le nettoyage se poursuit, la reconstruction s’organise.

Aujourd’hui de nombreux choix s’ouvrent au japonais et une véritable prise de conscience se fait sur la manière de vivre avec la nature. Le Japon est un pays en proie aux tremblements de terre (environ 5000 par an soit 10% de l’activité sismique mondiale), aux typhons et également au volcanisme. Chacun vit avec cette nature fortement présente mais une nouvelle fois, elle a repris ses droits et sa place.

Alors, au moment où les préoccupations écologiques font l’actualité, où les besoins énergétiques peinent à être comblés, le Japon s’interroge sur sa manière de vivre et de construire son avenir. Il passera forcément par une alliance avec la nature.
Un programme pour la mise en place de panneaux solaires innovants dans de nombreuses régions et surtout sur les terrains devenus inexploitables est en cours, un projet de lois qui imposent des panneaux solaires sur l’ensemble des nouvelles constructions est à l’étude.
Le pays entend passer de 9% à 20% d’énergie naturelle entre aujourd’hui et 2020.

Souhaitons aux japonais et à leurs chercheurs de leur d’ouvrir de nouvelles voies et peut-être de nous montrer le chemin qui nous mènera à une vie harmonieuse avec la nature, une vie humble face aux éléments une vie équilibrée entre tous.

Vincent Stevenel
29 juillet 2011
 
Volontaire à Shiogama du 30 mai au 6 juin 2011

Nature et détritus – Ishinomaki – mai 2011

Remerciements :

Je tiens à remercier toutes les personnes de l’association Caritas Japan qui ont travaillé à nos côtés, tous les volontaires que nous avons croisés, tous les habitants qui ont accepté notre aide.
Je pense à tous ceux qui encore aujourd’hui sont dans la précarité et à tous ceux qui les aide quotidiennement.
Merci également à ma femme d’avoir organisé ce séjour et de nous avoir permis d’apporter activement notre modeste contribution.
Enfin, merci à Japonaide nous permettre de publier cet article sur leur site.

Les photos qui illustrent cet article ont été faites par un des Frères de l’organisation. De notre côté, nous n’avons fait aucune photographie, estimant que les lieux devaient se graver dans notre mémoire et que nous n’étions pas venu faire du tourisme.
Vous trouverez de nombreuses photos et de films sur les villes que nous citons par de simples recherches Google.

Liens :

Site de l’association Caritas Japan (en anglais) : http://www.caritas.jp/english/

Blog du Frère installé à Caritas Japan – Shiogama (en japonais) : http://abnoendshiogama.blogspot.com/

Site d’un journaliste rédacteur et photographe français qui a travaillé comme volontaire à Caritas Japan – Shiogama :
http://www.wmaisy.com/
dans la rubrique « Tohoku : quotidien et solidarité » vous trouverez de très belles photos de solidarité.

Plan de la région sur Google Map :
http://maps.google.com/maps?hl=fr&ll=38.317417,141.136551&spn=1.264947,1.274414&sll=38.348119,141.055527&sspn=0.284868,0.611801&t=h&z=10&vpsrc=0
Sur la partie « satellite » de Google Earth, certaines images montrent les villes après le passage du tsunami.


2 Responses to Regard sur le cataclysme, le travail de volontaire et la reconstruction du pays

  1. Ping : Japon : 11 mars 2011 : regard sur le cataclysme, le travail de volontaire et la reconstruction du pays #7 | JAPONAIDE

  2. Ping : 東北地方太平洋沖地震 津波被災地ボランティアレポート – 宮城県塩釜市にて 2011年5月30日~6月6日 – | JAPONAIDE

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